Marivaux / Galin Stoev
Le Prince aime Sylvia qui aime Arlequin. Comment résoudre ce triangle amoureux, sinon en le transformant en quatuor saisi par une double inconstance ? Dosant à merveille sensualité et cruauté, Galin Stoev éclaire la violence très actuelle de ce jeu de dupes.
Chez Marivaux, la légèreté du propos n’est jamais qu’apparente. Les histoires d’amour sont aussi - ou d’abord - des histoires de pouvoir, et Cupidon ne trouble en rien un ordre social fondé sur la domination des puissants. Déjà familier de l’auteur, le dramaturge Galin Stoev, directeur du Théâtre de la Cité à Toulouse, met en scène une de ses plus réjouissantes mécaniques théâtrales. Derrière le désir, il débusque le mépris de classe. Sous l’élégance de la langue, il traque les mensonges. Et dans la difficulté des personnages à démêler le vrai du faux, il voit émerger cette notion de post-vérité qui gangrène près de trois siècles plus tard les rapports sociaux.
Scénographie, lumière, costumes, vidéos et même le choix des musiques soulignent cet entre-deux temporel troublant, entre l’atmosphère bucolique d’une rotonde en verre installée au centre du plateau à celle technologique d’un palais converti en salle de télésurveillance. La Double Inconstance, ou comment un texte classique réussit à pleinement nous enchanter, tout en racontant « quelque chose de nous, aujourd’hui. »
Galin Stoev revisite l’oeuvre de Marivaux et exacerbe à plaisir l’amoralité de ses chassés-croisés amoureux. LES INROCKS
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