La peinture a longtemps été fascinée par la recherche de l’Ailleurs. Les peintres des 18e et 19e siècles ont même nourri l’imaginaire collectif et soutenu l’aventure coloniale par des visions exotiques ou orientales largement rêvées, et surtout très stéréotypées. Impossible d’y revenir : au XXe siècle, la peinture a développé sa conscience critique, s’est éloignée de ces exotismes trompeurs et a massivement accompagné les combats politiques les plus émancipateurs. La recherche de l’Ailleurs est sans doute alors à chercher du côté de l’abstraction, qui ouvre à la peinture et à ses regardeurs des zones nouvelles, faites de réflexion et de spiritualité, baignées dans la matérialité des couleurs mais clairement détachées des contingences réelles du monde.
Y-a-t-il encore un Ailleurs pour la peinture aujourd’hui ? Que peuvent encore proposer les peintres dans un monde globalisé, cartographié à l'extrême et surtout saturé d’images ? Quand les visions de l’Ailleurs sont surtout le fait d’une industrie touristique qui promeut et survend des "destinations de rêves" très formatées ? C’est cette situation très actuelle de la peinture qu’entend aborder l’exposition Les Enfants du Paradis, avec un titre emprunté pour sa poésie à un film célèbre de Marcel Carné.
À la poursuite de l’Eldorado, et à la recherche d’un autre ailleurs qui ne soit ni l’exotisme ancien du monde colonial, ni les visions formatées du tourisme mondial, ni le rêve ultra-capitaliste des paradis fiscaux, l’exposition Les Enfants du paradis rend compte d’une nouvelle génération de peintres français et étrangers qui, depuis plusieurs années, peuplent l’espace de la toile de scènes énigmatiques, de paysages indéterminés, de paradis délavés, de communautés improbables. Voguant sans complexe entre figuration et abstraction, ces rêveries picturales affirment aussi la peinture comme un lieu de jouissance intense et colorée : l’art est un Eldorado en soi.
Signe d’une véritable richesse et d’un renouveau de la peinture contemporaine, l’exposition invite à un voyage autour d’explorations picturales inédites, entre enchantements et désenchantements, entre illusions perdues et nouvelles extases.
Artistes : Dan Attoe, Hernan Bas, Jules de Balincourt, Romain Bernini, Guillaume Bresson, Nina Childress, Jérémy Demester, Tim Eitel, Till Gerhard, Eberhard Havekost, Thomas Lélu, Li Qing, Pierre Seinturier, Claire Tabouret, Ida Tursic & Wilfred Mille, Iris Van Dongen.
Commissariat : Jérôme Sans, Jean-Max Colard, Avec la collaboration d’Isabelle Bernini
Source : Open Agenda
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