Jacques Schwarz-Bart a été le saxophoniste du RH Factor de Roy Hargrove et a joué aux côtés de D’Angelo et Erykah Badu parmi tant d’autres très grands. Originaire de Guadeloupe, il est un fervent défenseur des racines afro-caribéennes du jazz et « The Harlem Suite » qu’il nous offre, retrace son parcours de sa petite île jusqu’à Big Apple où il s’est installé dans le mythique barrio de Harlem, à l’époque cœur noir de la ville, refuge des diasporas caribéennes et place forte des Afro-américains. « De nombreux morceaux, précise-t-il, reflètent la dure réalité humaine des Noirs en milieu urbain aux États-Unis, tout en rendant hommage à l’histoire de Harlem en tant que lieu de naissance de plusieurs révolutions musicales ».
« Tout au long de ce disque, j’ai aspiré à peindre une fresque moderne riche en couleurs, tout en restant fidèle à la tradition africaine de la musique comme source de guérison et de célébration de la vie ». Guérison, vie: n’est-ce pas là une très juste définition de ce qu’est le jazz, de ce que sont « les » jazz, musiques par essence venant d’univers multiples, mais parlant sans cesse du monde qui est le nôtre, même quand nous pensons y être autres…
Ce concert est musicalement unique, puissant et généreux : voyez donc quel casting de rêve énergise ce quartet! Mais il l’est aussi parce qu’il retrace en filigrane un parcours humain assez exceptionnel: Jacques est, en effet, le fruit de deux souffrances ancestrales qui ne sont pas éteintes, mais sont en même temps deux cultures infiniment foisonnantes. ‘Dès le biberon, j’ai reçu une éducation religieuse juive et la musique vaudou, ce sont des références constantes pour moi’. Son père, originaire d’une famille juive d’Europe Centrale, n’est autre qu’André Schwarz-Bart, l’auteur d’un des plus beaux Prix Goncourt jamais décernés: le roman choc ‘Le Dernier des Justes’ (1959) et sa mère Simone, célèbre écrivaine guadeloupéenne, figure de la négritude, est l’autrice d’un savoureux ‘Plat de porc aux bananes vertes’ (1967) dédié à Aimé Césaire et continue de tisser une œuvre mêlant mémoire de l’esclavage et célébration des femmes noires oubliées par l’Histoire.
La vie de leur fils est un détonant résumé de cet air de famille: il délaisse Sciences Po, le Conseil Général de Guadeloupe et le Sénat pour un saxo découvert précocement (sic) à l’âge de 24 ans, hante le Caveau de la Huchette pour très vite embarquer pour la Berklee College de Boston où il enseigne toujours. Sa vie? Celle qu’il résume d’un humour très cool: « être noir et juif mélangé, c’est déjà pas facile, mais en France on me prend en plus pour un Arabe! ». Pas grave pour qui s’est aussi profondément nourri de la philosophie héritée de la Harlem Renaissance des années 20-30.
The Harlem Suite : un monument d’émotion et d’élégance. – Jazz Magazine
Un disque majeur ! – Patrice Blanc-Francard
Jacques Schwarz-Bart – saxophone
Gregory Privat – piano
Reggie Washington – contrebasse
Arnaud Dolmen – batterie
0 Commentaire Soyez le premier à réagir