Jusqu'au 12 janvier 2025, l’exposition « Camille Claudel à l’œuvre : Sakountala » propose d’entrer au cœur de la création de ce chef-d'œuvre à l’histoire très mouvementée. Rassemblant près de 100 objets, l’exposition revient sur le processus créatif de Sakountala, l’histoire de sa réception mais aussi sa source d’inspiration littéraire ou encore les nombreuses variations que Camille Claudel en a proposées à la fin de sa carrière. Bénéficiant de prêts exceptionnels du musée Rodin, de la Bibliothèque nationale de France et du musée d’Orsay, cette exposition a reçu le label « Exposition d'intérêt national » du ministère de la Culture.
En 1888, Camille Claudel n’a que 21 ans lorsqu’elle expose Sakountala, un couple d’amoureux inspiré de la littérature indienne. C’est cette œuvre qui la fait connaître du public et de la critique et la seule qui lui vaut une récompense au Salon au cours de sa carrière. Pourtant, elle n'obtient pas la commande de l'État qui lui aurait permis de tailler un marbre monumental. Camille Claudel donne alors le plâtre de Sakountala au musée de Châteauroux, en 1895. Au moment de son installation, le pied gauche de Douchanta est brisé. Puis, l’œuvre est décriée pour son caractère érotique, sa taille, sa massivité, sa fragilité ou encore sa patine par la bourgeoisie locale qui peine à apprécier son travail. L’œuvre se dégrade ensuite progressivement dans les réserves du musée. Elle n’en sort que dans les années 1980 à la suite de la redécouverte de l'artiste.
La Reconnaissance de Sakountala, drame écrit par le poète hindou Kâlidâsa, probablement au IVe ou au Ve siècle, raconte l'histoire du roi Douchanta qui rencontre Sakountala pendant une partie de chasse. Après avoir épousé Sakountala, Douchanta est victime d’une malédiction et l’oublie. Si ce mythe a rarement été traité en peinture ou en sculpture, il a fait l'objet de plusieurs traductions en français, d'un ballet et de pièces de théâtre. Dans l’exposition, maquette de décor, projets de costumes ou encore photographies offrent un aperçu du décorum mis en œuvre pour impressionner et dépayser les spectateurs lors de ces représentations. Les visiteurs sont invités à comparer les mises en scènes très marquées par l'orientalisme et la surenchère décorative avec le traitement du thème par Camille Claudel, dépouillé, sobre et hors du temps.
Ce n'est qu'en fin de carrière que Camille Claudel parvient à traduire Sakountala en matériau noble. En 1905, elle en sculpte une version réduite en marbre pour la comtesse de Maigret, sous le titre Vertumne et Pomone. Prêtée par le musée Rodin pour l’évènement, celle-ci témoigne de la virtuosité de la sculptrice et du degré de perfection qu'elle a atteint. Le bronze, édité par son fidèle soutien et ami Eugène Blot, est présenté la même année au Salon d’automne sous le titre L’Abandon. Dénuée de référence mythologique, cette appellation charge l’œuvre d’une dimension plus allégorique, tout en répondant aux besoins de sa commercialisation. L'année suivante, l'État commande à Camille Claudel une statue de femme dérivant de Sakountala. Désormais seule et blessée, elle est représentée en fille de Niobé succombant à une flèche décochée par Apollon ou Artémis.
Source : Open Agenda
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