Le

À 20h00

Le Trianon

80, Boulevard Rochechouart
75018 Paris

38.30€

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L'histoire de Johnny Jane s'apparente à celle d'un mouvement intérieur. La plupart de ses chansons surgissent au fil de longues balades solitaires et sans but précis dans les rues de Paris, avec un casque vissé aux oreilles. Il faut que je découvre . Porté par ces mots, susurrés à lui-même dans un dialogue interne, ce compositeur, interprète et multi-instrumentiste de 25 ans a parcouru des sentiers musicaux à rebours. Doté d'une oreille aiguisée, Johnny Jane a systématiquement recherché l'ADN musical des styles musicaux et des artistes qui ont attiré son attention, pour bâtir un arbre généalogique traversé de correspondances entre époques musicales et rapports de causalité manifestes - tel le lien entre le Velvet Underground, les Strokes et leurs héritiers. Rien n'est laissé au hasard dans ses textes en vers libres, ni dans ses mélodies, harmonies et arrangements, qui oscillent avec précision, à la croisée des chemins. Pop sophistiquée parcourue d'orgues Fender Rhodes, chanson française teintée d'effets de vocoder, électro atmosphérique French Touch et batteries années 90' issues du rock et du post-punk anglo-saxon Toute l'identité de son premier album tient du voyage et du parcours de ses influences multiples. A commencer par son nom d'artiste, clin d'il à la Ballade de Johnny Jane composée par Serge Gainsbourg pour le film Je t'aime moi non plus, en hommage à Jane Birkin. Comme Gainsbourg, Johnny Jane dit travailler peu, congédiant ainsi, d'un sourire suffisant, ses dix années d'efforts consacrés à étudier le piano, le solfège, les percussions et la guitare au Conservatoire Supérieur de Musique d'Orléans, sa ville natale. Pourtant, Émile - son vrai prénom - reconnaît observer tout autour tout le temps, ces détails cruciaux qui échappent souvent au regard. Ce temps de contemplation ritualisé à l'excès, dans lequel le temps devient extensible, est nécessaire à son processus de création. Ses chansons naissent comme des lueurs qui ne tiennent pas compte des secondes, minutes et heures imprimées par les horloges. Elles prennent forme de façon aléatoire, par un déclic soudain. Parfois, lorsqu'il marche dans la rue et le plus souvent quand il est assis au piano, micro ouvert. Les images, les sons, les émotions s'impriment alors dans sa musique, comme des témoins tangibles d'une apparente futilité de l'existence, qui se transforme en gloire des petites choses. Comme ce bleu évaporé du sky de Bye Bye et le rouge pas comme les autres de la chemise de Justine, qui figurent parmi les titres phares d'Attitude(s). Fouilleur de l'âme, Johnny Jane recherche en toute chose la fragilité de l'instant. Comme à l'époque où faisait de la photo, et se baladait jour et nuit avec son appareil Canon 50mm pour capturer sur des séries de clichés des accidents merveilleux et des rencontres fortuites de passants. C'était durant ses études à l'Académie Royale des Beaux-Arts de Bruxelles, intégrée après un bac littéraire. Depuis ses 16 ans, Johnny Jane avait compris être hors norme, hors la loi, et sans doute un peu paumé, préférant se noyer dans le texte de En Attendant Godot - Qu'est-ce qu'on fait maintenant ? On attend. Mais en attendant ? - à la méthodologie butée de l'enseignement secondaire. Toujours au conservatoire d'Orléans, il avait décidé de suivre des cours de théâtre et, en incarnant le personnage de Vladimir dans Beckett, il s'était reflété dans l'impitoyable lucidité de sa vision sur le monde : d'une telle simplicité, ironie et élégance, commente Johnny Jane. Adolescent, il découvre aussi les Illuminations de Rimbaud, se balade avec un long trench aux allures rétro, et écrit des poèmes - Une suite d'élucubrations et de clichés adolescents, se souvient-il. Ils l'entraîneront néanmoins à aiguiser sa plume, à se lancer dans ses premières compositions et à faire la rencontre capitale, sur les bancs du lycée, de Carl et Renaud, un tandem de producteurs - encore aujourd'hui ses meilleurs amis - qui l'ont aidé à composer et produire certaines de ses chansons. Entre émotion sincère et second degré réjouissant, Kleenex - toute rimée en Ex - s'est révélée à sa plume pendant qu'il écoutait le débit en syncope et à la césure des mots, de Françoise Hardy, sur Comment te dire Adieu (écrite par Serge Gainsbourg). A la fois récit d'un prélude et d'un deuil d'une histoire d'amour, l'album Attitude(s) avance avec cette allure propre à Johnny Jane, entre profondeur, dandysme, humour et insolence. Il y est question d'un Maître dont le navire semble faire naufrage, mais papillonne sur les flots. Les Lois de l'Univers semble dictée par l'état d'ivresse d'une rave et conjugue une ligne mélodique évoquant Que je t'aime (de Johnny Hallyday) et un orgue d'église évoluant comme une Toccata et fugue de Bach. Ultra pop, Plus rien à perdre suit un rythme tout en up tempo, en contrepoint d'un texte dressant le portrait d'une génération désabusée qui créé plus à partir du néant que de l'espoir, explique Johnny Jane. Avec une volonté de lâcher prise, poursuit-il, comme si la seule chose qui restait était le plaisir de l'instant. Resurgissent alors les influences musicales de groupes évoquant des passés idylliques et les couleurs rêveuses du Velvet Underground, qui s'apparentent à un possible refuge. Profilée comme des ailes d'avion, Bye Bye et Justine s'imposent vigoureusement dans la skyline de Johnny Jane, entre effets de synthé et refrains aériens, rimes croisées et jeux de mots qui entremêlent poésie et douce ironie. On a l'impression alors que Justine se dessine au fil du texte, comme le personnage fascinant d'une sérigraphie pop warholienne qui hante ses rêves. Fascinants, les clairs-obscurs de Johnny Jane ressemblent à ces phares scintillants des voitures qui éclairent les routes au bout de la nuit, que l'on croise dans à À l'Américaine : Prends les clés de la caisse, viens on se casse d'ici / On va s'aimer à l'Américaine, sur la Route 66", chante-t-il sur une mélodie vaporeuse et un cur de synthés planants. Une chanson évoquant les milliers de kilomètres parcourus sur les routes par Johnny Jane, à bord de sa Citroën bleu azur, parfois juste pour aller voir, seul, un coucher du soleil sur la côte la Côte de granit rose, au nord de la Bretagne. Observer pour Johnny Jane est une attitude mentale, une façon d'être, une manière de vivre. C'est également un jeu, qui a souvent mené ce caméléon de la pop à se glisser dans la peau de différents personnages et à emprunter plusieurs apparences, coupes de cheveux et styles vestimentaires - bohème-chic, moderne, vintage, dandy-branché ou clochard céleste Le masque qu'il arbore sur la pochette d'Attitude(s) est alors un symbole de la complexité qui constitue chaque être, multiple par définition. C'est un jeu de piste, un geste ironique à la Marcel Duchamp posant une moustache sur la Joconde, visé à questionner où se trouve le vrai et à se protéger du sérieux glaçant de la société.

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