Lorsqu’elle prend un billet simple pour Haïfa, Sonia n’a qu’une hâte : partir s’y ressourcer auprès de sa soeur aînée. Fragilisée par une carrière théâtrale au point mort à Londres et un échec amoureux, Sonia espère renouer là-bas avec ses racines, retrouver la douce lumière des étés de son enfance.
Dès son arrivée, elle rencontre une metteuse en scène passionnée et bien décidée, malgré les embûches, à monter un Hamlet à Ramallah avec des comédiens palestiniens. La tentation des planches est trop forte, et voilà Sonia lancée dans une aventure artistique, politique, et profondément humaine.
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Nouvelle sensation des lettres britanniques, Isabella Hammad, anglo-palestinienne, signe ici un roman doux-amer qui raconte avec délicatesse et force un retour aux sources sur une terre en tumulte permanent. Aux côtés de l’inoubliable Sonia, nous voici aux premières loges d’un projet courageux qui ose croire en l’art comme espace de liberté inaliénable.
Autrice anglo-palestinienne qui a grandi à Londres, elle a été élue par la prestigieuse revue Granta parmi les vingt meilleurs jeunes romanciers britanniques de la décennie. "Hamlet le long du mur" a reçu un accueil phénoménal, et a paru dans vingt pays.
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Bibliothèque (niveau 1)
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Hamlet le long du mur (Enter Ghost). Isabella Hammad. Trad. de l'anglais par Josée Kamoun. Gallimard (Collection Du monde entier). 448 pages. 24 €
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« Tout va bien ?
— Salim vient d’être suspendu. »
Je sentais que j’étais censée en avoir le souffle coupé. « C’est qui, Salim ?
— Le frère de Mariam ! Il est question de lui retirer son immunité parlementaire.
— Oh noon ! De quoi est-ce qu’on l’accuse ?
— Menace à la sécurité de l’État, j’imagine. Ça n’a pas été précisé.
— Ce qui veut dire ?
— Qu’il communique avec l’ennemi, en gros. »
J’ai marqué un temps. « Ça va aller, toi ?
— Non. Salim est une pointure, il appartient à l’un des grands partis.
— Et ce n’est pas vrai ?
— Quoi, qu’il communique avec l’ennemi ? En voilà, une question !
— Pardon, je ne sais pas, moi. Je suis désolée que ton ami ait été arrêté. C’est terrible. Enfoirés d’Israéliens. »
Ma voix sonnait faux. Il me fallait une rallonge de caféine. Je revoyais le jeune Mansour, qui avait quelques années de plus que nous, un air d’étudiant dégingandé. Haneen et moi nous trouvions face à face dans la cuisine. Elle a ouvert le lave-vaisselle d’un coup sec.
« Tu ne reconnais même pas la maison de tes grands-parents.
— Je te demande pardon ! Il pleuvait, il faisait nuit. Pourquoi tu ne me l’as pas dit, toi, qu’on l’avait vendue ? C’est vrai, tu me tiens en dehors de tout, après, forcément… À croire que tu veux tout garder pour toi.
— Ah, je vois. » Elle a pivoté vers moi avec un faux sourire. « C’est pour ça que tu es là ? » J’entendais des vagues de sarcasme dans son intonation. « Tu veux la reprendre ?
— Tu as tout compris. » J’ai claqué des doigts. « Je suis venue reprendre la Palestine. »
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