Jouer l’ingénieur et l’aménageur - Polytech Lille

Le

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Polytech Lille

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« La capacité d’apprentissage détermine la réussite de projets d’innovation et permet donc d’accroître notre compétitivité. Améliorer cette capacité s’avère essentielle non seulement pour nos ingénieurs et scientifiques qu’ils soient débutants (formation initiale) ou expérimentés (formation continue), mais aussi pour tous les élèves de toutes les écoles au sens le plus large. L’enjeu est donc majeur. La démarche d’apprentissage par le jeu apparaît comme une solution à la fois naturelle et redoutablement efficace, sur socle de sciences dures (informatique, biologie...) et molles (psychologie, sociologie...), face à un monde qui s’accélère et qui se complexifie à qui mieux mieux ». Par ces quelques lignes, les ingénieurs et les scientifiques de France, Lyon-Rhône-Ain (IESF) invitaient étudiants et diplômés de l’enseignement supérieur dans le cadre de la journée nationale de l’ingénieur, le 9 avril 2019, à des ateliers centrés sur le thème: « L’apprentissage par le jeu (serious game), comment apprendre à distance aujourd’hui et demain ? ». Au-delà des débats que peuvent susciter ces discours prosélytes pour la diffusion des jeux sérieux dans les formations supérieures, force est de constater qu’ils sont déjà pratiqués, et parfois de longue date, non seulement par les écoles d’informatique type EPITECH Rennes Bordeaux mais aussi par l’INSA de Lyon notamment. L’université de Lille n’est pas en reste, à l’image de Newscraft, un jeu d’éducation aux médias lauréat de l’appel à manifestation d’intérêt valorisation SHS 2019 et co-financé par l’I-SITE ULNE et la SATT Nord. En décembre 2016 étaient organisées à LILLIAD et l’Ecole nationale supérieure d’architecture et de paysage (ENSAPL) deux journées d’études consacrées aux relations entre urbanisme, architecture et jeu, suivies d’une troisième journée d’études organisée en mars 2018 à Polytech-Lille intitulée « L’urbanisme, l’architecture et le jeu vidéo : que fabrique le Game Design ? » . L’ensemble a donné lieu à deux publications dont l’édition numérique du Monde s’est fait récemment l’écho. Présentes à Polytech-Lille, Carine Henriot et Nathalie Molines, de l’Université de Technologie de Compiègne (UTC) ont ensuite organisé le 27 novembre 2028 une journée d’études et lancé un appel à textes pour la revue Netcom sur le thème des « Jeux sérieux urbains et numériques ». Enfin, le Centre de recherches sur les liens sociaux (CERLIS) a organisé, à Paris, à la Maison de la recherche de l’Université de Sorbonne nouvelle, les 6-7 décembre 2018, un colloque consacré à : « La gamification de la société. Vers le régime du jeu ». Plusieurs questionnements sont communs à toutes ces initiatives : ceux des supports de la simulation, de l’importance fondamentale du « médiateur », des effets performatifs de la mise en récit, réaliste ou prospective, utopique ou dystopique. Le colloque du CERLIS, pour sa part, conduit à faire une distinctionentre ce que Huizinga définissait comme étant le caractère autotélique du jeu, à savoir une activité libre, voire « frivole » (Brougère), qui aurait sa fin en soi, et le jeu comme moyen en vue d’une autre fin : la concertation, la prévention ou, en entreprise (ce que sont bien les agences d’architecture et les bureaux d’études en aménagement, urbanisme et ingénierie urbaine), la mise en tension et la productivité, un management en mode projet, la mise en compétition, le déploiement de « challenges ». Une autre distinction s’y apparente : celui fait entre les termes anglo-saxons de « play » - qui correspondrait à l’attitude ludique du joueur - et de « game » davantage entendu comme structure de jeu pouvant être modélisée et découpée en activités multiples. Elle deviendrait, de ce fait, transposable dans quantité d’autres sphères par une sorte de mouvement d’accaparement et de banalisation de la part des acteurs institutionnels, associatifs et/ou économiques qui, désormais, mettraient en scène des activités autres que le jeu au sein d’une structure de jeu. Michel Lavigne s’interroge sur la signification sociale et culturelle de cette extension de l’utilisation du jeu, de cette « société ludique » ou prétendument telle - un concept développé en 1980 par Alain Cotta - pour mieux masquer la progression concomitante de la rationalisation et du contrôle de nos activités. Nous assisterions au déploiement continu d’un « capitalisme ludique » où, à travers la gamificationde la société et de l’entreprise, on chercherait à faire fonctionner le monde réel du travail notamment, mais aussi de la pédagogie, comme un jeu en y investissant l’énergie, l’enthousiasme, la joie de surmonter les obstacles et de progresser, la coopération ou, au contraire, la compétition. Bref, le jeu rendrait à nouveau le travail ou l’apprentissage exaltants et permettrait de dépasser les oppositions simplistes, entre amusement (ce que serait le jeu) et sérieux (ce qu’il ne serait pas), entre fiction - « faire comme si » - ou irréalité (ce que serait le jeu), et réalité (ce qu’il ne serait pas).

Deux principaux thèmes (non exclusifs) pourront alimenter les contributions et les échanges au cours de cette journée recherche de Polytech-Lille : La ludicisation : Comment un objet qui n’était pas considéré comme un jeu en vient à être perçu comme tel ? En quoi ce changement de perception peut conjointement mener à faire évoluer les acceptions du terme « jeu » ? Cette grille nous semble pertinente pour comprendre ce qui est enjeu dans l’évolution des formations d’ingénieur et les métiers de l’architecture : ludiciser la formation pour la rendre plus plaisante ou gamifier les enseignements pour mieux transmettre les apprentissages ? Le Building Information Modeling (BIM) pourrait-il être envisagé comme le reflet de la ludification de nos sociétés ou comme une tentative de gamification (importation des mécanismes du jeu) d’un outil numérique parfois austère ? La cartographie : Bon nombre de jeux vidéo reposent essentiellement sur une interaction entre le joueur et une carte. Plusieurs hybridations entre cartographies et jeux se sont développées et sont devenues parties intégrantes de la diffusion de certains genres ludiques : la grande stratégie avec Risk (Albert Lamorisse, 1957) ou Europa Universalis (2000) et les city builders représentés de nos jours par Cities Skyline (2015). Avec le développement du Web 2.0 et des usages collaboratifs et contributifs du numérique, les jeux vidéo et la cartographie ont vu leur usages et modes de production évoluer (Chauvet, 2019 ; Mericskay, 2016). Les espaces de liberté de la cartographie participative se multiplient : développement de serious gamingpar le détournement ; cartographies fictive et collaborative utilisant des outils professionnels ; cartographie participative d’open-world comme celles des MMORPG. Par ailleurs, l’acte de jouer peut aussi être motivé par la volonté communautaire de produire de la donnée géoréférencée. En lien, des formes d’usage se développent afin de motiver cette production : mapathon, la mode des traces GPS ou encore le géocaching. Quels enjeux ces évolutions révèlent-elles vis à vis des hybridations jeux/cartographie ? Et comment le Big data, en généralisant le traitement et la publication automatisés par des algorithmes d’un nombre croissant de données, contribue-t-il à les renouveler ?

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